Christine Lagarde : L’heure de l’indépendance pour l’Europe
Dans un monde incertain, Christine Lagarde appelle l’Europe à se réinventer, à reprendre le contrôle de son destin, et à s’affranchir des dépendances économiques et géopolitiques, notamment face aux décisions de Donald Trump.
L’Europe à l’heure de la souveraineté
Dans un contexte international de plus en plus instable, Christine Lagarde appelle à une prise de pouvoir collective. Selon la présidente de la BCE, l’Europe doit se réorganiser autour de son indépendance, non seulement sur le plan militaire mais également énergétique et financier. « Nous devons ensemble décider de prendre mieux notre destin en main« , affirme-t-elle, soulignant qu’une telle démarche est indispensable pour répondre aux défis modernes.
Lagarde souligne que la politique commerciale de Donald Trump, marquée par des hausses de droits de douane, représente un danger pour la stabilité économique européenne. Loin de rester une simple escarmouche, cette guerre commerciale pourrait avoir des effets négatifs sur la croissance de la zone euro, avec des pertes estimées à -0,3% de croissance si la situation persiste. « Toute guerre commerciale fait des perdants« , rappelle-t-elle, précisant que l’Europe ne doit pas suivre le chemin de la réciprocité agressive.
Lagarde va plus loin en insistant sur la nécessité pour l’Europe de se doter de nouvelles capacités financières. Elle déplore que l’épargne européenne, bien plus importante que celle des États-Unis, soit largement investie dans des bons du trésor américains, au détriment du financement de l’économie européenne. Pour la présidente de la BCE, la crise actuelle appelle à une redirection des investissements vers des projets internes, notamment pour soutenir l’effort de défense et la sécurité.
L’inflation : un combat de tous les jours
L’inflation reste un sujet central pour Christine Lagarde, qui souligne que l’Europe doit continuer de se battre pour la stabilité des prix. Avec une prévision d’inflation de 2,3% pour 2025, elle insiste sur la nécessité de maintenir cet objectif malgré les incertitudes. « Notre impératif absolu est de maintenir la stabilité des prix », précise-t-elle, tout en appelant à la prudence face aux pressions économiques.
La présidente de la BCE reconnaît que les méthodes pour parvenir à cette stabilité peuvent diverger. Certains plaident pour une action rapide et décisive, tandis que d’autres optent pour une approche plus graduelle, prenant le temps d’analyser toutes les données avant de prendre des mesures. Elle recommande de ne pas céder à l’urgence et de faire preuve de rigueur dans l’analyse des obstacles à venir.
Les tensions commerciales exacerbées par les décisions de Donald Trump restent une source majeure d’incertitude. Lagarde souligne que ces politiques protectionnistes risquent de freiner la croissance de l’Europe. En plus de l’impact direct sur la croissance, ces guerres commerciales augmentent l’incertitude économique, ce qui pourrait rendre encore plus difficile la gestion de l’inflation dans les mois à venir.
Re-prioriser les dépenses pour financer l’avenir
Dans le cadre de la réorganisation des priorités économiques, Lagarde évoque la nécessité de rétablir la stabilité des finances publiques. Cela passe par une « re-prioritisation des dépenses publiques« , notamment en vue de financer les dépenses liées à la défense et à la sécurité. Pour elle, il est impératif de réduire certaines dépenses pour permettre des investissements dans ces secteurs vitaux.
En réorientant les investissements, Christine Lagarde voit dans ce processus une opportunité pour renforcer la résilience économique de l’Europe. Elle appelle à créer de nouveaux produits d’épargne et à réexaminer le rôle de l’épargne européenne dans le financement des besoins internes, au lieu de soutenir massivement l’économie américaine par l’achat de bons du trésor.
Enfin, Lagarde souligne que l’indépendance énergétique et numérique est un volet clé de cette refonte économique. Avec les défis liés à l’approvisionnement en énergie et à la cybersécurité, l’Europe doit investir dans des solutions internes pour assurer sa souveraineté à long terme. Ces domaines devront être au cœur des priorités financières européennes si l’on veut qu’une véritable indépendance se concrétise.